Caps. de Vie: (L'ENLÈVEMENT)
LE CRI DE MINUIT
Un soir, à notre culte de famille, nous avions lu, ma femme, mes deux
enfants et moi, le quatrième chapitre de la première épître de saint Paul aux
Thessaloniciens.
Avant d’aller me livrer au repos, assis dans un fauteuil, je réfléchissais aux
derniers versets de ce chapitre.
La journée avait été très fatigante et, comme d’importantes affaires
m’obligeaient à me lever le lendemain de grand matin, j’allai me coucher plus
tôt que d’habitude.
Mais je ne pouvais trouver le sommeil. Ces paroles mystérieuses, troublantes,
que nous avions lues quelques instants auparavant, me poursuivaient :
longtemps, elles me tinrent éveillé.
« ...Car le Seigneur Lui-même, à un signal donné à la voix d’un archange et au son de
la trompette de Dieu, descendra du Ciel: et les morts en Christ ressusciteront premièrement.
Ensuite nous, les vivants alors sur la Terre, nous serons enlevés tous ensemble avec eux au
milieu des nuées, à la rencontre du Seigneur, dans les airs, et ainsi nous serons toujours avec
le Seigneur... » (1 Thessaloniciens 4:16-18).
Quelle étrange chose, me disais-je, et comment doit-on comprendre ces
paroles ? N’est-ce qu’une simple image ? Ou devons-nous, au contraire, y
voir la prédiction précise d’un événement dont l’accomplissement littéral est
absolument certain ?
Ma femme et ma fille, chrétiennes convaincues, très attachées à tout
l’enseignement de l’Écriture, se rangent sans la moindre hésitation à cette
dernière opinion. Mon fils Pierre et moi restons plutôt sceptiques. C’est si
invraisemblable... Et malgré moi, mon esprit travaillait, travaillait... Après bien
des efforts pour chasser ces pensées, mes paupières finirent par s’alourdir et
je m’endormais profondément.
Un sursaut brusquement me réveilla. Il faisait grand jour. Je me levai à
la hâte, craignant de m’être mis en retard. Quelle ne fut pas, tout d’abord,
ma surprise de constater que la place de ma femme était vide. Supposant,
toutefois, que ce n’était qu’une absence de peu de durée, car ses vêtements
étaient posés à leur place habituelle, rapidement, je m’habillai.
Comme je n’entendais aucun bruit, je me dirigeai vers la chambre contiguë,
celle de notre fille Marie.
- « Peut-être est-elle malade, me dis-je, et ma femme est auprès d’elle ? » Je
frappe. Point de réponse. Je tourne le bouton de la porte, j’entre : Personne.
Voilà qui est vraiment bizarre. Ah ! ça, où peuvent-elles bien être allées toutes
deux ? J’appelle dans le couloir : « Marie ! Maman ! Marie ! » Pas de réponse.
Une étrange émotion me saisit alors, mon coeur se serra, et j’eus toutes les
peines du monde à rester calme.
Je montai à l’étage supérieur, où se trouvait la chambre de notre garçon,
Pierre. Il était debout, déjà habillé. D’habitude, il n’était pas aussi matinal, et
je le regardai, surpris. Il avait l’air tout renfrogné.
- Bonjour papa, me dit-il, comment vas-tu ? Moi, j’ai passé une mauvaise
nuit, pleine de cauchemars ; je me suis réveillé de très bonne heure et, ne
pouvant me rendormir, j’ai préféré me lever. Est-ce toi qui m’as appelé ?
- Sais-tu ce que sont devenues ta mère et ta soeur ? fis-je, affectant
l’indifférence.
Il faut croire qu’une certaine inquiétude perçait quand même dans le ton
de ma voix, car il répondit, nerveux :
- Mais non ! Pourquoi ? Où sont-elles ?
Sans rien ajouter, je redescendis précipitamment dans ma chambre pour
achever au plus vite ma toilette, comme j’en ressortais, Pierre était là devant
moi :
- Impossible de les trouver, s’exclama-t-il. Mais, le plus fort, c’est que
la porte d’entrée de la maison est fermée à double tour, et la clef dans la
serrure.
Nous nous regardâmes sans un mot, absolument bouleversés.
Machinalement, je revins à la chambre de Marie. Sur sa table, bien en évidence,
sa Bible était ouverte.
Je m’approchai et lus ce verset souligné : « Tenez-vous prêts, car le Fils de
l’homme viendra à l’heure que vous ne pensez pas » (Matthieu 24:44).
Ce passage, me disait toujours ma femme, avec assurance, se rapporte à
la venue soudaine de Jésus-Christ, quand il apparaîtra mystérieusement pour
enlever les siens.
- Mais non, répondais-je, mais non, il s’agit là, tout simplement, de notre
préparation à la mort.
Un terrible point d’interrogation venait de se dresser pour moi : Seraientelles
parties au devant du Seigneur ?...
Mais je repoussai de toutes mes forces cette pensée.
Cependant Pierre, qui ne tenait plus en place, et moi qui voyais à l’évidence
que quelque chose de plus qu’anormal s’était passé, nous décidâmes de ne
pas attendre le déjeuner et d’aller, chacun par un chemin différent, visiter les
maisons de nos intimes, à la recherche de nos bien-aimées.
******************
Je me rendis tout d’abord chez la soeur de ma femme, Mme Alençon. Elle
et son mari font partie de notre paroisse ; lui-même en est le trésorier. En
somme, personnes des plus respectables, aimant leur église, mais fort lancées
dans le monde.
- Sûrement, personne n’est encore levé, me disais-je, tandis que je sonnais
à la porte. Enfin, ma belle-soeur parut, expliquant avec force excuses qu’elle
avait eu à préparer elle même le déjeuner :
- Car, figurez-vous, dit-elle, parlant avec une extrême volubilité, figurezvous
le tour que nous a joué notre bonne : nous avions passé la soirée chez
nos amis Lemaire, où il y avait une partie de bridge qui n’en finissait pas,
et nous étions rentrés très tard ; or, notre bonne que nous avions toujours
considérée comme une fille très sérieuse, affectant même des airs de piété
que je trouvais plutôt exagérés, une vraie petite fanatique, eh ! bien, imaginezvous
qu’elle a découché et elle est partie je ne sais où... Hélas ! A qui peut-on
se fier aujourd’hui...
Elle s’arrêta un moment pour reprendre haleine, puis continua de plus
belle :
- Mais, ce qui nous a le plus stupéfaits, c’est que nous avons trouvé toutes
les portes fermées, exactement comme nous les avions laissées hier soir en
allant nous coucher.
Ah ! ça c’est trop fort, m’écriai je, n’y tenant plus. Et en quelques mots, je
dis les raisons qui m’amenaient à faire une visite aussi matinale.
Quand ma belle-soeur apprit la mystérieuse disparition de ma femme et de
Marie, elle faillit se trouver mal.
- Ecoutez, lui dis-je, pour donner le change, je n’ai pas encore déjeuné ;
permettez-moi de m’inviter chez vous. Et j’entrai.
Mis au courant, son mari prit la chose en riant, disant que ces dames
avaient probablement voulu me faire une plaisanterie : - « Vous pouvez
être certains qu’elles sont déjà rentrées à l’heure qu’il est, et qu’elles vous
attendent, inquiètes peut-être de votre absence ».
Cette idée remonta un peu ma belle-soeur, et l’on se mit à table.
- Ah ! Je regrette, mais il faudra se passer de lait, dit Mme Alençon, le
front redevenu soucieux ; notre laitier, pourtant toujours si prompt, n’est pas
encore arrivé...
Sur ces entrefaites, on sonna ; c’était Pierre.
Très agité, il nous raconta qu’il revenait de la maison, après avoir vainement
parcouru tout le quartier, et que, dans plusieurs habitations où il était entré
pour demander des nouvelles, le même événement s’était produit.
« Les rues sont pleines de monde, dit-il en terminantx ; des gens très excités
courent, en quête, comme nous, de membres de leurs familles. Il en est qui
pleurent à chaudes larmes... Non, vous ne vous imaginez pas l’émotion qui
règne en ville... »
Sa voix s’altéra et ses yeux se mouillèrent.
On sonna plusieurs fois avant la fin du déjeuner ; c’étaient des amis de la
maison allant aux nouvelles, ou cherchant, eux aussi, des parents disparus.
L’un d’eux, M. Fernay, ami intime de mon beau-frère, survenant, s’écria,
la figure bouleversée : « Mes deux garçons, l’un de quinze, l’autre de dix-huit
ans, nous ne savons pas ce qu’ils sont devenus ! Ni leur grand-mère paralysée,
et qui n’avait pas quitté le lit depuis six ans ».
A cette nouvelle, Monsieur Alençon pâlit, gagné par l’inquiétude générale.
II rapporta même une conversation qu’il avait eue, la veille, avec un ami dont
les idées religieuses lui avaient paru, confessa-t-il, quelque peu excessives.
Cet ami insistait, disant : « Un trop grand nombre de membres de nos églises
ne sont guère chrétiens que de nom, aimant l’argent et le plaisir plus que
Dieu, et se conformant au monde à un tel point qu’il est impossible de les
reconnaître pour des disciples de Jésus-Christ.
« L’indifférence des masses pour les questions religieuses va en
s’accentuant toujours plus, ajoutait-il avec tristesse, et la tiédeur spirituelle
est la caractéristique de notre temps. Les prophéties achèvent de s’accomplir.
L’ivraie est plus haute que le blé. Le levain a fait lever et fermenter toute
la pâte. L’apostasie bat son plein...
« Jésus n’a-t-il pas dit : « Quand le Fils de l’Homme viendra, trouvera-t-il la
foi sur la terre ? » (Luc 18:8). Entendez-vous gronder l’anarchie ? ajoutaitil
; l’autorité s’en va en poussière ; les empires s’écroulent : « les étoiles
tomberont du ciel » avait prédit Jésus.
« Comme poussés par une main invisible, les Juifs rentrent en masse en
Palestine dans des conditions et des circonstances troublantes et singulièrement
analogues à celles du retour de la grande captivité de Babylone.
« Prenez garde ! Les temps sont graves. Jamais les appels de Dieu n’ont
résonné plus solennellement qu’à cette heure ».
« Il affirmait enfin - et ici la voix de mon beau-frère, devenue plus grave, se
mit à trembler légèrement - qu’au moment choisi par Dieu et connu de Lui
seul, le Christ viendrait soudainement comme un voleur dans la nuit, pour
enlever ses rachetés, les vivants comme ceux déjà morts. Cette transformation
inouïe devait s’effectuer avec la rapidité de l’éclair, « en un clin d’oeil » : il y
aurait un grand cri, un appel de trompette que percevraient seulement ceux
auxquels ils s’adresseront.
« Et c’est alors, disait mon ami, que s’accomplira cette parole du Christ :
« Aux jours de Lot, on mangeait, on buvait, on vendait, on plantait, on bâtissait,
et le jour où Lot sortit de Sodome, il tomba du ciel une pluie de feu et de soufre qui
les fit tous périr. Il en sera de même le jour où le Fils de l’Homme apparaîtra... Je
vous le dis, en cette nuit-là, de deux personnes qui seront dans le même lit : l’une
sera prise et l’autre laissée » (Luc 17:26-37).
Je crains bien, conclut mon beau-frère, secouant la tête avec une sorte
d’accablement qui contrastait singulièrement avec son air assuré du début, je
crains bien que ce jour ne soit arrivé ; et... fit-il à voix plus basse et à peine
perceptible... Il s’arrêta.
- Et ? demandâmes-nous, d’une voix anxieuse.
- Et, c’est triste à dire, nous sommes parmi les laissés.
***************
La matinée s’avançait. Nous nous étions levés pour prendre congé, Pierre et
moi, le regard chargé d’une insurmontable tristesse. Il nous tardait de rentrer
chez nous.
C’est en tremblant que je tournai la clé dans la serrure, que je poussai la
porte et que j’entrai.
La maison, hélas ! était toujours vide. Nous ne nous sentîmes pas le courage
d’y rester, tant était lugubre le silence des chambres désertes, et cette solitude
pesait lourdement sur nos âmes, comme une inexorable condamnation.
Sous peine de se laisser écraser par le découragement, il fallait à tout prix
sortir de cette angoisse, agir, voir quelqu’un... Rassemblant toute mon énergie,
je proposai d’une voix que je m’efforçais de raffermir :
- Si nous allions un peu à nos affaires ?
- Oui, répondit Pierre, d’une voix sourde.
Le coeur nous manquait.
Sans enthousiasme, mon fils se dirigea vers son travail, et moi, le cerveau
vide, j’allai à mon bureau.
En chemin, j’aperçus un homme qui se dirigeait vers moi, les bras levés,
comme fou. C’était un de nos voisins, incrédule s’il en fut. Sa figure était à
peine reconnaissable tant son air était atterré.
- « Je viens du cimetière, où est la tombe de mes vieux parents et d’une
petite fille de sept ans que nous avons perdue. Non, vous ne vous imaginez
pas, fit-il, la voix tremblante d’émotion, vous ne vous imaginez pas l’aspect
du cimetière, comme si un tremblement de terre était survenu cette nuit. Des
dalles de tombeaux ont sauté en l’air ; ça et là, des fosses béantes et vides, des
cercueils éventrés ne contenant plus que quelques oripeaux, hideux à voir. De
mes parents, des croyants à l’ancienne mode, je n’ai plus trouvé trace. Et de
ma petite fille non plus, ajouta-t-il dans un sanglot qui m’arracha les larmes.
Si vous l’aviez connue cette enfant. Elle priait comme un ange et parlait sans
cesse du ciel... Ah ! sûrement, c’est la fin du monde ! »
Et sur ces paroles il se sauva, comme poursuivi par la plus affreuse
vision.
Des foules inusitées d’hommes, de femmes et d’enfants, dont les traits
contractés, les yeux fixes, traduisaient l’anxiété intense, remplissaient les rues
où toute la vie semblait s’être jetée.
De nombreux édifices publics avaient mis leur drapeau en berne et les
cloches de plusieurs églises sonnaient le glas, ce qui accentuait encore la note
d’indicible inquiétude.
- -
Dans le quartier commerçant, je remarquai très peu de magasins fermés.
Mais il ne paraissait pas s’y traiter d’affaires.
Place de l’Hôtel de Ville, il y avait un rassemblement.
Les gens les plus en vue en matière politique me semblèrent y être au
grand complet. Faisant les cent pas, par petits groupes, ils discutaient avec
animation.
Par contre, tous les cafés étaient ouverts, et, devant, des cercles s’étaient
formés où des hommes, avec de grands gestes, parlaient très haut.
Sans m’arrêter, j’arrivai à mon bureau.
Là, j’appris que le teneur de livres, ainsi que mon brave commissionnaire,
attachés depuis fort longtemps au service de la maison, ne s’étaient pas
encore montrés. Mes deux commis étaient assis à leur place, le porte-plume
en l’air, le regard dans le vide.
Je ne me sentis pas plus le courage de leur donner du travail que d’ouvrir
mon courrier.
Ressortant presque aussitôt, je me dirigeai vers la Bourse.
Pénétrant dans le grand hall, je constatai que l’affluence y était plus forte
qu’ailleurs. Jamais je n’y avais vu autant de monde.
Mais au lieu du brouhaha habituel des coulissiers criant à tue-tête, des
agents de change s’interpellant ; au lieu de tout l’assourdissant vacarme bien
connu, un silence profond, d’autant plus impressionnant, et une sorte de
stupeur planaient sur cette foule.
Du consentement unanime, « selon l’expression même du Président de
la Chambre de Commerce », il avait été décidé qu’un délai de grâce de trois
jours serait demandé aux pouvoirs publics; suspendant toutes les échéances
qui tombaient ce jour-là.
Une quantité incroyable de raisons furent émises pour tâcher d’expliquer
l’événement qui avait jeté un tel trouble dans la ville. Mais chacun s’accordait
à conclure : « évidemment, c’est surnaturel ».
On se sentait envahi par un indéfinissable malaise; et le sentiment instinctif,
irraisonné, qui dominait était: Que va-t-il, maintenant, se passer ? Ceux qui
restent sont assurément bien à plaindre...
****************
L’heure du dîner était depuis longtemps passée. Nul n’y avait pris garde.
L’après-midi, sans qu’il y eût la moindre entente, toutes les affaires
furent arrêtées, les magasins fermés, sauf les cafés, qui, eux, regorgeaient de
monde.
Dans les rues, sur les places, des groupes se formaient ; une sorte de
sympathie s’établissait entre gens qui ne se connaissaient pas...
Des crieurs d’éditions spéciales de journaux commençaient à passer. On
s’arrachait les feuilles. L’une d’elles portait en manchette, en gros caractères :
« Serait-ce la fin du monde ? » Après quelques minutes de lecture, déçus de
n’y rien trouver qui apaisât leur inquiétude, les gens les froissaient et les
jetaient à terre, rageusement.
Devant les maisons où portes et volets étaient demeurés clos, la famille
ayant disparu en entier, maisons très rares, on s’arrêtait, des attroupements se
formaient, on se nommait les habitants du logis ; il y avait là un tel, il y avait
là une telle... On frappait, on appelait ; les commentaires allaient leur train.
Dans l’un des groupes, un homme pérorait. On l’écoutait avec une
attention extraordinaire. C’était un membre assidu de la réunion de prières
hebdomadaire de notre église, à laquelle ma femme ne manquait jamais
d’assister.
Il disait à ce moment:
- Et ! oui, c’est bien le jour dont saint Paul parle aux chrétiens de Corinthe :
« Voici un mystère que je vous révèle : nous ne mourrons pas tous, mais tous nous
serons changés, en un instant, en un clin d’oeil... » (1 Corinthiens 15:51).
Le Christ, aussi, avait prédit cet événement.
L’Evangile nous avertissait : « Tenez-vous prêts, car le Fils de l’homme
viendra à l’heure que vous ne pensez pas... » (Matthieu 24:44).
« Pour moi, je suis d’autant plus inexcusable que j’ai toujours admis cette
vérité. J’aimais entendre expliquer les prophéties et je ne rejetais aucune
d’elles ; mais dans l’étude que j’en faisais, il y avait surtout une part de
curiosité intellectuelle, d’attrait du mystère. J’y ai cru, mais avec mon cerveau
et non avec mon coeur ; ma vie n’en restait pas moins égoïste et superficielle,
et pour tout dire, j’étais loin d’attendre le Christ comme on attend un être
tendrement aimé qui peut revenir d’un moment à l’autre...
« Sans doute, j’aimais les réunions religieuses, mais d’un amour intéressé,
pour les consolations et pour la satisfaction que j’en retirais, et non pas en
vue de ma consécration au service de Jésus-Christ pour le salut des pécheurs.
Je me servais de Dieu, je ne le servais pas. J’étais un parasite de l’Eglise. Et
quand je chantais « Christ est ma vie », ou bien « Tenons nos lampes prêtes,
chrétien préparons-nous », c’étaient des mensonges qu’inconsciemment je
chantais... »
A quelque distance de là, sur une petite place, j’aperçus l’un des conférenciers
laïcs les plus connus et les plus écoutés de la ville. Avocat
de grand talent, il avait toujours montré une activité religieuse remarquable.
Un cercle nombreux l’entourait.
Mais sa parole avait perdu le ton oratoire. Des phrases simples, courtes,
rendaient plus émouvant son discours.
- Mes amis, disait-il, nous nous sommes toujours crus très forts en logique.
Et nous l’avons été, c’est sûr, pour tout ce qui a trait aux affaires de ce monde.
Mais au point de vue chrétien, nous avons été des insensés.
« Nous affirmons, en effet, d’une part tenir l’Écriture Sainte pour la
suprême autorité religieuse, la souveraine règle de notre Foi, et puis, d’autre
part, nous lui donnions, par notre vie, les plus graves démentis.
« C’est que nous voulions accommoder la Parole de Dieu à la sagesse
humaine, et ainsi, sur l’autel du monde et du qu’en dira-t-on, nous avons
sacrifié la fidélité à l’enseignement du Christ et des Apôtres.
« Et voici que toutes nos oeuvres, toute notre agitation, viennent d’être
éprouvées par un feu que n’ont pas allumé des mains d’hommes. Et nous
voyons que tout a brûlé comme du chaume...
« Les prophètes, qui parlent du retour de Jésus pour venir enlever son
Eglise avant la terrible tribulation qui s’approche - simples images, disionsnous,
hyperboles, où l’imagination orientale se donne libre cours. Pourquoi
Jésus parle-t-il ainsi ? simplement pour faire une plus forte impression sur les
âmes. Mais nous n’avons à en retenir qu’une invitation à nous préparer pour
la venue soudaine de la mort.
« Comme si, s’exclamait l’orateur, Jésus, qui est le Prince de la Vie, avait
jamais voulu s’identifier avec la mort, avec le prince des épouvantements !...
« Au fond, la vérité, c’est que nos coeurs incrédules n’admettaient pas, malgré
la lucide et formelle précision des avertissements du Christ et des Apôtres,
qu’un événement aussi prodigieux pût jamais se produire.
« Encore si nous étions véritablement, sincèrement, préparés à la mort. Mais
avouons qu’aucun de nous ne voulait se détacher assez de ce monde, et renoncer
à soi-même au point de mettre Dieu et les intérêts de son Royaume en première
place dans sa vie et dans ses pensées. Nous accommodions au mieux de nos
intérêts et de nos affaires, la parole du Christ : « celui qui cherchera à sauver sa
vie, la perdra ; et celui qui la perdra, la retrouvera... quiconque ne renonce pas
à tout ce qu’il possède ne peut être mon disciple... » Tout cela était bien quelque
part dans notre tête, mais n’avait pas un sens réel, absolu, dans notre vie. De
l’argent, de l’argent, gagner toujours plus, tel était notre suprême objectif.
« De même que la plupart des Juifs, contemporains de Jésus-Christ, avaient
refusé de prendre à la lettre, c’est-à-dire au sérieux, les différentes prophéties
qui précisent, dans l’Ancien Testament, la première venue de Jésus, de même,
nous avons traité avec une supériorité dédaigneuse les prophéties du Nouveau
Testament, comme de l’Ancien, relatives à sa seconde venue. Nous avons voulu
passer au crible de nos raisonnements la déclaration du Seigneur : « Voici, je
viens bientôt. Heureux celui qui garde les paroles de la prophétie de ce livre ».
Apocalypse 22:7, ne comprenant pas, tant nous étions aveugles, que la durée de
nos siècles n’a même pas, devant Dieu, la valeur d’un millième de seconde. En
sorte que la venue soudaine, fulgurante du Sauveur, nous a trouvés préoccupés
de tout, sauf de cet événement!
« N’allions-nous pas jusqu’à oser prétendre que Saint Paul et les chrétiens de
l’Eglise primitive s’étaient trompés en prenant à la lettre la promesse du retour
prochain du Seigneur, et en attendant, avec une sainte ferveur, ce retour ? Nous
n’avions pas compris l’enseignement profond de Notre Seigneur qui voulait
que l’Eglise, Son Epouse, se considérât, à partir du jour de son Ascension et
jusqu’à Son retour, comme une veuve, et qu’elle portât, en quelque sorte, Son
deuil, dans un monde en révolte contre Lui (Matthieu 9:14-16).
« Au lieu de cela, l’Eglise s’est installée dans le monde, et elle a déclaré : Je
suis assise en reine ; je ne suis point veuve ! (Apocalypse 18:7-9).
« Et dire qu’en discutant ainsi les paroles de l’Écriture, nous avions
l’orgueilleuse prétention de leur donner un sens plus idéal, plus spirituel que
le sens littéral, c’est-à-dire celui que lui attribuaient les Apôtres. Ce n’est, hélas!
que trop manifeste.
« Ah ! le terrible réveil ! ».
*****************
Le soir, les églises des divers cultes de la ville étaient ouvertes. La foule
s’y entassait, anxieuse, pour entendre l’explication de cette extraordinaire
« visitation », et aussi dans l’espoir de recevoir quelques paroles de consolation
et de réconfort.
Aucun groupement religieux, remarquait-on, n’avait été enlevé dans sa
totalité.
Nulle part, il ne fut fait de service liturgique. Les assemblées étaient
houleuses. Il y eut même quelques désordres, dans les grandes paroisses.
Partout, la surexcitation était extrême. Les uns se lamentaient, sanglotaient ;
d’autres récriminaient ; on dut emporter plusieurs femmes évanouies.
Ceux qui fréquentaient le moins les églises étaient les plus irrités. Ils
interpellaient violemment au passage les plus assidus aux offices.
Si vous eussiez été de vrais chrétiens, disaient-ils, vous nous auriez avertis.
Qu’est-ce que vous allez donc faire à l’église, tous les dimanches ? Ceux-ci
baissaient la tête : « C’est vrai, nous n’avions que l’apparence de la piété,
reniant ce qui en fait la force » (2 Timothée 3:1-5). Nous nous contentions,
amateurs de beaux discours, de dissertations religieuses sur les événements du
jour. Friands d’éloquence, nous courions les églises à la suite du prédicateur en
renom. Nous nous grisions de belles paroles, préférant infiniment la finesse
d’une pensée philosophique habilement présentée, aux appels fidèles de
l’Evangile, à l’explication toute simple de la Parole de Dieu.
« Sans bien nous en rendre compte, ce que nous recherchions, dans le
culte, nous le reconnaissons, c’était une jouissance intellectuelle, des émotions
religieuses, et non pas la prédication apostolique, toute rude et toute nue, de la
croix.
« Nous l’expions cruellement ! »
**********************
Pierre, curieux de ce qui se dirait dans les églises catholiques, m’avait quitté
pour entrer dans la principale d’entre elles. Il devait me rejoindre à notre lieu
de culte habituel. Comme c'était le carême, pour eux, un dominicain connu occupait
la chaire.
Sa figure marquait un véritable abattement. Parmi les fidèles, l’agitation était
extrême. Des prières furent récitées qui se perdaient dans le brouhaha général.
Enfin, dans un silence relatif, le missionnaire prit la parole.
A la surprise de tous, il annonça qu’il lirait d’abord, en français, quelques
textes de l’Écriture. Ce furent précisément ceux qui prédisaient l’événement
prodigieux qui bouleversait en ce moment le monde entier, comme l’avaient
confirmé des dépêches venues de partout. C’étaient le chapitre 4 versets 51-52
de la première épître aux Corinthiens.
- « Reconnaissons-le loyalement, reprit le père dominicain, si la Sainte
Écriture avait eu parmi nous l’autorité que le Saint-Esprit lui confère, ces paroles
eussent suffi pour nous préserver de l’affreux malheur qui nous arrive. Nous
aurions vécu vraiment détachés de ce monde, de ses pompes et de ses oeuvres,
et nous nous serions tenus prêts, comme les Vierges sages de la Parabole, pour
la venue soudaine de l’Epoux divin; au lieu que l’événement de cette nuit nous
frappe en plein coeur. Malheureusement, ce n’est pas la Sainte Parole qui fait
autorité pour nous, c’est la Tradition. Pour sacrée qu’elle soit, elle n’en est pas
moins parole humaine ; ce sont...
Un tumulte, des trépignements, des cris hostiles, partant d’un groupe de
prêtres debout dans le choeur, interrompirent le prédicateur, tandis qu’un autre
groupe prenait fait et cause pour lui, et un grand vacarme s’ensuivit.
Craignant d’être mêlé à de fâcheux incidents, Pierre, qui était debout près de
la porte, se hâta de sortir et vint me retrouver.
Dans notre église, plusieurs visages familiers manquaient. Mon coeur se serra
douloureusement quand j’aperçus, à la place qu’affectionnaient ma femme et
ma fille, des personnes qui m’étaient inconnues...
***********************
Notre pasteur était là. II était assis au banc des diacres, le front serré dans ses
deux mains, en une sorte de prostration. Aucun chant. On entendait de grands
soupirs, des plaintes, de ferventes prières d’humiliation.
Ici, l’on se lamentait sur le départ d’enfants ; là, il s’agissait d’un mari, d’une
femme, d’un père, d’une mère...
Le pasteur monta en chaire, fit un signe de la main et, en quelques mots,
adjura l’auditoire, de s’efforcer au calme.
Puis, après une courte prière silencieuse, il reprit la parole.
- « Aucun de vous, dit-il, sur un ton impossible à rendre, ne peut... se faire
une idée de l’amertume que j’éprouve... quand je me vois... devant vous... avec
mes cheveux blancs... et ma longue expérience... et que je mesure... les terribles
responsabilités de mon long ministère... »
Ces mots, dits d’une voix brisée par l’émotion, produisirent sur-le-champ une
grande détente dans l’auditoire, en détournant un peu de soi-même, l’attention
de chacun. L’assemblée entière, les yeux fixés sur son vieux et respecté pasteur,
buvait ses paroles.
Après quelques secondes de pause, il reprit, d’une voix un peu plus
assurée :
- « Je suis accusé... et je m’accuse... de vous avoir entretenus, au cours de mes
visites, de mes prédications et de mon ministère, beaucoup plus des questions
de cette vie, et des pensées des hommes, que des affaires célestes et des pensées
de Dieu.
« On me reproche, aussi, de vous avoir tenus dans l’ignorance des prophéties
de la Sainte Écriture touchant les choses à venir, comme de la terrible Visitation
qui devait se produire, et qui s’est produite, cette nuit, parmi nous.
« Que pourrais-je dire pour ma justification ?... Seulement ceci : je vous ai
enseigné ce que l’on m’a enseigné à moi-même : à considérer la Bible comme
contenant, sans doute, la Parole de Dieu, la connaissances du Salut, et la plus
haute morale du monde, mais non comme étant, dans toutes ses parties,
d’inspiration divine et la règle infaillible et sans réserves de nos foi. J’y voyais
un alliage de pensées divines et de pensées humaines, et c’était à notre raison
de faire son choix, les allégories y tenant une très grande place.
« C’est ainsi, par exemple, que vous m’avez entendu interpréter la seconde
venue du Seigneur en disant que toutes les fois qu’une âme se convertit, Jésus
revient sur la terre, et descend, ainsi, dans cette âme...
« Ah ! Je comprends, maintenant, que ce n’est pas pour les interpréter, que
Dieu nous a donné les prophéties, dans l’Écriture, mais pour y croire...
« Eh, sans doute, il y a des allégories dans le Saint Livre, mais les affirmations
positives - et que l’on doit prendre à la lettre sous peine de manquer de respect
au texte, - y sont bien plus nombreuses encore. Telles sont celles qui auraient
dû nous préparer à cet événement.
« Ah ! qui peut sentir, en ce moment, plus que moi, la faiblesse de pareilles
excuses.
« J’appelais ce livre - et, d’une main qui tremblait, il éleva sa vieille Bible
au-dessus de sa tête - j’appelais ce livre « la Parole de Dieu ». Mais, par une
inconséquence dont je ne puis encore m’expliquer l’aveuglement, j’attribuais
l’origine et l’inspiration d’une bonne partie de son contenu à des cerveaux ou
à des volontés d’hommes... Je discutais l’autorité de ses prophéties, quand je
ne les niais pas... Je mettais en doute la plupart des miracles, les réduisant à des
faits de l’ordre naturel, grossis ou naïvement rapportés.
« Je suis même allé - et ces derniers mots furent dits d’une voix que l’émotion
étranglait - jusqu’à nier la valeur expiatoire du sang de l’Agneau sans tache...
« Mais comment pourrais-je, maintenant, après l’événement qui vient de
nous frapper tous, ne pas croire que la Parole de Dieu, quand elle affirme
une chose, veut dit exactement, et signifie littéralement ce qu’elle dit ? (Ces
derniers mots furent scandés avec un accent émouvant).
« C’est dans la douleur la plus profonde que je reconnais ma grande erreur,
mon impardonnable faute, et je m’en humilie, devant Dieu et devant vous, de
toute la force de mon âme ».
Et il s’arrêta, comme dans l’impossibilité de continuer.
Une vague d’intense sympathie souleva cette foule. Oubliant sa propre
détresse, l’assemblée entière, par un murmure d’affectueux encouragement,
chercha à soutenir le vieillard, presque défaillant sous l’effort de sa poignante
confession.
II reprit courage et, d’une voix plus ferme, continua :
« Mais je reconnais aujourd’hui mon égarement, et je vous demande pardon,
comme j’ai déjà demandé pardon à Dieu... »
Personne, dans l’assemblée, ne put retenir ses larmes devant une confession
si touchante.
« Il me reste quelques mots encore à ajouter. Je vous dois TOUTE la vérité,
nous le savons bien maintenant, c’est la Parole, pure et simple, du Seigneur.
Ce matin, après avoir fait dans la prière un humble et sérieux examen des
Écritures touchant les circonstances qui nous angoissent tous, je suis arrivé
à la certitude qu’il nous faut, hélas ! renoncer au glorieux privilège d’être
enlevés avec les Saints pour avoir part, avec eux, à la première résurrection,
cette « résurrection d’entre les morts », qui ne tenait pour ainsi dire aucune
place dans nos préoccupations religieuses, alors que l’apôtre Paul la considérait
comme la récompense suprême, le sceau glorieux de sa fidélité : « Je regarde
toutes choses comme une perte, afin, disait-il de gagner Christ... pour parvenir, si
je puis, à la résurrection, celle d’entre les morts » (Philippiens 3:8-11). (Plusieurs
de nos versions françaises ont commis la déplorable, la malheureuse erreur de
traduire ce passage, et les autres analogues, par « résurrection des morts ». Le texte
grec dit : « d’entre les morts », ce qui est essentiellement différent).
« Cependant, le Saint-Esprit le déclarait formellement : « Ils revinrent à la vie
et régnèrent avec Christ pendant mille ans... C’est la première résurrection. Heureux
et saints ceux qui ont part à la première résurrection. La seconde mort n’a point de
pouvoir sur eux; mais ils seront sacrificateurs de Dieu et de Christ et ils régneront
avec lui pendant mille ans » (Apocalypse 20:4-6).
« Toutes ces déclarations, pourtant si précises, si simples, celles de l’apôtre
Paul aux Thessaloniciens et aux Corinthiens, notamment, et les avertissements
si nets du Seigneur, que nous trouvons aux chapitres 24 de Matthieu, 17 et 21
de Luc, et tant d’autres, auraient dû nous suffire...
Mais nos esprits étaient obscurcis, et nous étions égarés par l’incrédulité
et par les mensonges d’une « science théologique, faussement appelée
science » (1 Timothée 6;2-21), - lisant notre Bible avec notre raison, discuteuse,
et non avec la foi et la simplicité de coeur de petits enfants - comme aussi par
la crainte du ridicule.
« Ainsi, nous nous sommes mis sous le joug du monde et nous allons avoir
notre part de son jugement. Car il ne faut point nous le dissimuler, nous allons
passer par une tribulation telle que le monde n’en a pas encore connu de
semblable.
« Les puissances sataniques vont être déchaînées, les représailles terribles
de la justice divine vont s’abattre sur ce monde et sur nos Eglises infidèles, et
la terre secouée comme un arbre dont on fait tomber les fruits. « Malheur à
la terre et à la mer, est-il écrit, car Satan est descendu vers nous, animé d’une
grande colère... » (Apocalypse 12:12).
« Voilà ce que voulait nous éviter le Seigneur, quand il faisait déclarer par le
Saint-Esprit à tous les hommes qui se réclament de son nom : « Sortez du milieu
de Babylone, mon peuple, afin que vous ne participiez pas à ses péchés, et que
vous n’ayez point de part à ses fléaux » (Apocalypse 18:4). Et par son ange, Il
encourageait ses Saints en disant : « Parce que tu as attendu avec patience mon
retour, et cru à la parole qui l’annonçait, moi aussi je te garderai de l’heure
de l’épreuve qui va venir sur le monde entier pour réprouver les habitants de la
terre » (Apocalypse 3:10 et Luc 21:35).
Comme l’affirment les textes sacrés, l’Antichrist va paraître, « l’homme de
péché », le fils de la perdition, l’adversaire qui s’élève au-dessus de tout ce
qu’on appelle Dieu, et qui, par la puissance de Satan, fera toutes sortes de
miracles, de signes et de prodiges mensongers... (2 Thessaloniciens 2:4-11).
Le pasteur, visiblement exténué par l’effort qu’il venait de fournir, fit encore
une pause, paraissant vouloir rassembler tout ce qui lui restait d’énergie pour
une exhortation suprême.
L’assemblée était haletante sous le poids des révélations qui lui étaient
faites. Elle attendait, toute tremblante, une parole qui lui donnât encore
quelques lueurs d’espoir. D’une voix lente et solennelle, le pasteur ajouta
simplement ces mots :
« Et maintenant, frères et soeurs, humilions-nous sous la puissante main de
Dieu... Convertissons-nous de tout notre coeur, plaçons-nous sous l’aspersion
du sang de l’Agneau, faisons appel à la miséricorde divine, et prenons
l’engagement de persévérer par sa grâce, jusqu’au bout, quoi qu’il arrive, afin
que Dieu ait pitié de nous ».
******************
Le pasteur s’était assis. Spontanément, l’assemblée entonna un cantique
d’humiliation et de supplication ; puis, dans un silence solennel, sortit lentement
du temple et s’écoula à travers les rues de la cité.
Mon fils et moi, partageant l’émotion commune, nous reprîmes avec plus
de calme le chemin de la maison, bien que, dans la rue, l’excitation semblât
augmenter d’heure en heure. Arrivés chez nous, du même mouvement
spontané, nous tombâmes à genoux dans la chambre de Marie, près de la
Bible restée ouverte aux passages qui venaient d’avoir un accomplissement
si tragique. En pleurant, Pierre demanda pardon à Dieu d’avoir traité jusqu’à
ce jour, avec une si folle insouciance, Sa parole de vérité et Ses appels remplis
d’amour.
Le sentiment de mes péchés m’étreignait également. Je faisais, pour prier,
des efforts qui secouaient mon être entier, quand un appel angoissé m’amena
à la réalité...
Mon front et mes tempes étaient couvertes de sueur. Ouvrant les yeux, je
vis ma chère femme devant moi, la figure consternée, qui me tenait les mains.
Qu’as-tu donc, me disait-elle. Oh ! que tu m’as fait peur... Et sans lui
répondre, dans un sentiment de joie inexprimable, je m’écriai : Ce n’est donc
pas vrai... Tu es encore là... Tout cela ne s’est passé qu’en rêve... Oh ! merci,
mon Dieu !
***************
Un peu plus tard nous étions réunis, ma femme, mes deux enfants et moi, et
je leur racontai le rêve extraordinaire que je venais d’avoir.
Et plus j’y pensai, par la suite, plus je fus frappé de l’avertissement qui m’avait
été ainsi donné.
Le sens positif et absolu des déclarations solennelles de l’Écriture que je
venais de vivre si douloureusement dans ce rêve, m’apparut dans toute sa
saisissante clarté.
Je me rendis compte qu’il y avait là, en vérité plus qu’un rêve, mais un appel
poignant à cesser de jouer avec la patience de Dieu et avec Sa parole sacrée,
et qu’en définitive, il n’était pas exact d’appeler rêve ce qui pouvait être, ce qui
allait être, la tragique réalité de demain.
Je compris que, jusqu’à ce jour, j’avais vécu comme les vierges folles de la
parabole, et combien il était urgent, pour moi comme pour chacun, de tenir sa
lampe garnie et prête afin de pouvoir aller à la rencontre de l’Epoux lorsque,
« soudain il paraîtra » (Matthieu 25:1-13).
Je suppliai Dieu de pardonner mes péchés, ma tiédeur, mon ingratitude, de
purifier mon coeur dans le précieux sang de l’Agneau mort pour moi, de me
donner, enfin, son Saint-Esprit. Dans sa grâce, Il m’exauça. Et je consacrai dès
lors, sans réserve, ma vie à son service.
***************
Le « Voyage du Chrétien », de Bunyan avait été un rêve. Il n’en
approfondit pas moins dans les multitudes de coeurs les vérités de
l’Evangile. Ceci est un rêve ; continuellement demandé (il en est à son
110ième mille) des quantités de témoignages m’ont assuré qu’il n’avait
pas été publié en vain.
« Encore un peu, un peu de temps, Celui qui doit venir viendra et II ne
tardera pas » (Hébreux 10:17).
« Puisque toutes choses doivent se dissoudre, combien ne devez-vous pas être
saints et pieux dans votre conduite, attendant et hâtant, la venue du Jour de
Dieu, ce jour dans lequel les cieux enflammés seront dissous et les éléments
embrasés se fondront. Or, nous attendons, selon Sa promesse de nouveaux
cieux et une nouvelle terre où la justice habitera » (2 Pierre 3:11,13).
******************
MANIFESTE...
En communion d’esprit avec tous ceux qui attendent et qui aiment
l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, nous croyons :
• Que les signes des temps s'accordent à montrer, avec une indiscutable
évidence, que « les temps des Nations » (Luc 21:24) touchent à leur terme.
• Que le retour du Sauveur, dans le corps qu'il avait au matin de la résurrection,
doit, selon l'ordre du Maître, être attendu à tout moment (Matthieu 26:44).
• Que le « Corps du Christ », son Epouse mystique, composé des « vainqueurs »,
dès qu'il sera par venu au nombre fixé par Dieu, ressuscitera d'entre les
morts et sera enlevé « à la rencontre du Seigneur dans les airs » et qu'ainsi nous
serons toujours avec le Seigneur (Romains 11 et 1 Thessaloniciens 4:17-
• Qu'Israël, encore que dans l'incrédulité, sera ramené dans son ancien pays,
et qu'il se convertira ensuite tout entier quand, à nouveau, le Christ se
manifestera comme son Messie (Romains 11:26-33 et Apocalypse 1:7).
• Que tous les plans humains de reconstruction de ce monde sont voués
à l'échec, le « rétablissement de toutes choses » étant subordonné au retour
du Sauveur (Actes 3:21) quand toutes les nations seront placées sous
son sceptre (Psaume 11:8), dans « la nouvelle terre » - le Royaume de Dieu
attendu de l'Oraison dominicale.
• Qu'il est pour le chrétien, d'une suprême importance de reconnaître et
d'accepter ces vérités, puisqu'elles ont pour effet de créer l'état d'âme
que comportent la gravité redoutable, autant que l'éventualité sublime de
l'heure présente.
A quoi pensez-vous, chrétiens, de trésauriser ces malpropres papiers, et
ces jetons, que l'on s'obstine à appeler de L'ARGENT ! Il fait encore un peu
jour ; la nuit rapide s'approche où vous ne pourrez plus travailler pour le
Seigneur.
Le Seigneur Jésus a tant fait pour vous, que faites-vous pour lui... ?
Aidez-nous à la répandre. D'avance merci.
« Voici, le jour vient, ardent comme une fournaise, le terrible jour de l’Eternel...
Mais pour vous qui craignez, mon nom se lèvera le soleil de justice, au jour que je
prépare, dit l’Eternel des armées, célestes » (Malachie 4:1-3).
« Dieu a tellement aimé le monde qu’Il a donné son Fils unique afin que quiconque
croit en Lui ne périsse point, mais qu’il ait la Vie éternelle » (Jean 3:16).
« Le Ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point » (Marc
13:31).
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...L’un sera pris,
L’autre, laissé...
Message aux Eglises
Pasteur A. Antomarchi
20ième Edition, revue
115 000 exemplaires
1978
L’HEURE DE DIEU
Les événements tragiques qui bouleversent en ce moment ! l’humanité
entière donnent à l’écrit qui suit la pus brûlante actualité. Puisse-t-il toucher
votre coeur; car, ne vous y trompez pas, l’heure a sonné où le Christ va juger
l’Eglise et le monde. Comment échapperez-vous si, fermant les yeux et les
oreilles, vous négligez ou méprisez ses solennels avertissements?
Privas Février 1950.
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Cette brochure est épuisée ; notre frère le Pasteur Antomarchi a été
recueilli près de son Dieu le 28 Septembre 1952. Nous considérons comme
un devoir de faire rééditer ce message sans rien y ajouter ; il reste d’une
tragique réalité.
Que Dieu bénisse le travail de son serviteur !
Mme B. Chauvinc,
belle-soeur du Pasteur Antomarchi
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Devant l’importance de ce message, nous prenons la responsabilité de
mettre cette brochure à disposition de toute personne qui désire l’imprimer
pour elle-même.
Nous n’avons pu contacter ni Mme B. Chauvinc, ni l’Edition Librairie
Biblique Ambulante, Temple Allemand 85 CH 2300 La Chaux-de-fonds.
Séraïa Edition
PB 3080
79012 - NIORT Cedex
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